Je vous écris pendant que c’est encore chaud.
Hier j’avais un tournoi de padel, et on a perdu un match qui pique.
Contre des jeunes de 15 ans, numéros 1 junior du Portugal, qui nous ont donné une leçon de padel.
J’ai terminé en tilt, asphyxié et choqué d’avoir perdu.
On a perdu 6/4 6/4.
Cela s’est joué à quelques détails : une balle de débreak à 4-5 au premier set, qui après un échange dantesque, termine par une volée gagnante, finalement perdante sur la bande du filet, et une balle qui ne veut pas sortir d’un poil de cul, sur un de mes smashs à 4-4 au deuxième set.
J’ai passé ma soirée ensuite à une soirée d’anniversaire, où j’avais beaucoup de mal à ne pas me refaire le match en boucle.
Mon attention était en mode schizo, 50% ici et maintenant et 50% en mode replay.
Ça peut paraître ridicule d’être autant affecté, c’est du sport amateur, j’ai 43 ans et toutes mes dents (sauf 2 fausses car je me suis pris un poteau à vélo quand j’étais petit).
Et surtout c’est mon métier d’accompagner les gens, notamment dans la défaite. Et les aider à voir l’équilibre derrière toute chose. Pour ne pas se focaliser sur le résultat mais sur le plaisir d’évoluer. Et d’être qui on a envie d’être au travers de tous ces challenges.
Bref petit décalage entre la théorie, la posture et la réalité du terrain.
Encore une fois, we are all humans after all !
Alors pourquoi ça pique autant ?
Bonne question Romain. Tu serais pas coach toi ?
Regardons ensemble ce qui se joue à l’intérieur de moi.
Je vous emmène en caméra embarquée.
Mais déjà, je me rends compte de la chance que j’ai de pouvoir vivre ce genre de moments.
J’en ai vécu pleins en tant que coachs, mais j’étais du côté de la personne qui rassure, qui conforte, qui supporte inconditionnellement et qui remet l’église au milieu du village.
Là ce qui est intéressant, c’est que je suis en plein dedans.
Donc allez on allume la caméra et on va explorer.
Pourquoi je suis autant touché ?
Quand je dis touché, je parle dans mon corps, j’ai cette sensation d’accident, comme si j’étais en état de choc post-traumatique.
Je suis un soldat qui vient de rentrer du Vietnam, j’ai ma vie autour de moi, mais ma tête est encore là bas, sur le champs de bataille.
Petit aparté, je viens de me faire rire en réalisant que j’étais quand même bien loin présentement de la guerre du Vietnam, en étant posé dans mon cabanon de plage en mode Ernest Hemingway qui écrit ses mémoires les pieds dans l’eau, pendant que ma femme et mes enfants sont à l’église (celle au milieu du village).
C’est marrant, j’ai voulu écrire cette pépite à chaud pour me faire du bien, et pour partager un truc authentique, qui ne soit pas du bullshit de coach qui raconte sa vie trépidante en faisant semblant d’être vulnérable.
Mais là déjà, j’ai à peine commencé et je me fais rire.
Et d’un coup, ça a lâché dans mon corps.
80% de la charge post défaite a disparu. Envolée.
Donc pas de Pépite, on annule, j’ai plus rien à dire ?
Bah si déjà c’est fou de se rendre compte, à quel point écrire peut être thérapeutique.
On devait tous avoir une newsletter de Pépites, et pouvoir lire les comptes-rendus de déboires des uns et des autres (by the way en parlant de déboire, j’ai toujours pas rebu, à part la tasse hier contre les jeunots).
Maintenant que je suis libéré comme la reine des neiges, je vais peut-être aller me faire un plouf du coup ?
Mais non, allons au bout de l’exercice, même si je ne vous l’envoie pas, je serais content d’aller au bout.
Je reviens à la question initiale.
Pourquoi cette défaite pique autant (je pourrais déjà parler au passé, mais faisons comme si l’as de trèfle qui pique mon coeur piquait encore).
Pourquoi ?
Déjà, parce que je suis passionné.
Le sport et la compétition depuis tout petit c’est mon kif. J’adore jouer. Je ne fais pas les choses à moitié. Je suis all in. J’ai toujours vibré au moindre match, dès qu’il y a un petit enjeu. J’adore gagner.
J’adore… non je ne ferai pas la blague avec Christian.
Mais ce n’est pas la raison.
La raison, la vraie, c’est que mon égo n’a pas vraiment apprécié la petite leçon devant 50 spectateurs (oui 50 pas 50000, je sais…) par des gamins de 15 ans.
Je me suis fait attraper comme une mouche dans le piège à vinaigre.
Et pourtant, je m’étais préparé, je l’avais vu venir.
Ca pique parce fut un temps, que les plus de 40 ans ont pu connaître, c’était moi le petit gamin qui mettait des roustes à des vieux. C’était moi le petit prodige.
Mais non là j’étais le petit vieux carbonisé en fin de match, qui est allé serré les mains, en se sentant humilié, mais en disant quand même “well played guys”, en contemplant leurs petits sourires victorieux.
C’est bien ça, je me suis fait attrapé par mon égo, et j’ai passé tout mon match en prison mentale.
Je faisais de mon mieux, mais tout mon corps était imbibé de cette peur de me faire humilier.
De passer pour un âne et d’être ridicule.
Je sais que c’est ridicule et ça me tue, même si c’est censé ne pas tuer.
Avec un peu plus de recul, je me rends compte que parfois, on a besoin de vivre ces humiliations, pour arrêter d’avoir peur d’être jugé.
Quand je vis une défaite ou un échec comme ça, ce que j’aime, c’est voir mon process derrière.
Voir comment je me remobilise.
Voir si je vais passer des heures ou des journées en boucle.
Paradoxalement, la défaite renforce aussi le goût de la vie.
L’envie de continuer, de progresser, de devenir plus fort.
J’adore ce sport, juste après j’avais envie d’arrêter, mais j’ai déjà envie d’y retourner.
De me renforcer physiquement.
De devenir meilleur en défense.
D’apprendre de cet échec.
De devenir un meilleur partenaire (j’ai un peu perdu patience en fin de match).
De moins me faire attraper par mon égo.
Mais la défaite aussi te rappelle à quel point tu as de la chance d’être en vie.
D’avoir une famille, la santé, et de vivre dans un petit coin de paradis.
Bref, tout va bien et j’en fais des caisses.
Mais je sais que je ne suis pas le seul à avoir envie de se rouler par terre, ou de se cacher dans une grotte après une défaite ou un échec.
Ahhh je me sens bien.
Merci de m’avoir écouté.
Avec du recul, on voit aussi effectivement l’équilibre derrière toute chose.
Même quand tu perds, tu gagnes, même quand tu gagnes, tu perds.
En fait, tu ne perds jamais vraiment (à part Benoit).
Là par exemple, j’ai perdu, mais je gagne de pouvoir écrire cette Pépite, de pouvoir passer mon dimanche à la plage avec ma femme et mes enfants (plutôt que dans un hangar à jouer au padel), de pouvoir reposer mon corps, de travailler un peu sur moi, de mieux comprendre ce qu’on ressent après une défaite, pour mieux aider mes clients, de montrer à mes enfants qu’on ne gagne pas tout le temps et c’est ok etc etc.
Il y a toujours plein d’avantages, de “cadeaux cachés” derrière chaque événement “négatif”.
Plus on voit ces cadeaux plus on grandit, sinon on tourne en boucle, la fameuse révolution.
Je crois que la défaite aussi est un bon moyen de vérifier qu’on est au bon endroit.
Est-ce qu’on fait des choses juste pour gagner, juste pour plaire ?
Ou est-ce qu’on fait les choses parce qu’on aime fondamentalement ça ?
J’adore gagner, mais je fais du padel (ou un autre sport) parce que j’aime ça.
Le sport est un terrain de jeu formidable pour apprendre à se connaître, pour grandir, pour vivre des émotions fortes.
C’est quoi votre truc à vous ?
Allez, je vous laisse là-dessus, en vous souhaitant de sortir de vos prisons mentales.
De sortir du “je”, pour retrouver le goût du jeu, malgré tous les enjeux.
De prendre plaisir à évoluer, à grandir en conscience, à devenir moins con.
Bon dimanche à tous !
J’adore vous lire alors écrivez-moi (rombastide@gmail.com) !
From Lisbon 🇵🇹 with Love ❤️,
Romain
PS1 : toutes les newsletters précédentes se trouvent ici dans le Coffre Fort.
PS2 : si vous voulez un coaching de champions à faire tranquillement depuis chez vous, j’ai créé ce programme en ligne, fruit de mes 10 années de recherches et de pratique. Have a look et pareil, écrivez-moi si ça vous tente ?
Merci Romain pour ce partage qui fait sourire et qui est bien vrai ! La vie est faite de pleins de « Bref, tout va bien et j’en fais des caisses » et ça me parle :)